De la gentrification des villes à la gentrification des luttes

Il faut sauver Madame Nga !

dimanche 1er novembre 2015.

Bruxelles : Les vendeurs des kiosques du centre-ville viennent d’apprendre qu’ils doivent partir… très rapidement.

"Si je dois quitter mon boulot, je me tue ! Cela serait une catastrophe. Je touche une pension de 265 € et mon mari, très malade, est toujours à l’hôpital. Il a 80 ans", explique Nga Lê Thi Tuyet, la vendeuse à journaux de 78 ans du kiosque à journaux de la place De Brouckère. La vieille femme, arrivée en 1984 en Belgique, fuyant la répression communiste au Vietnam, travaille, depuis 27 ans déjà, dans le petit kiosque à De Brouckère. Chaque jour, Nga quitte à 5h30 du matin le petit appartement molenbeekois qu’elle loue avec son mari pour aller vendre les journaux du jour et des paquets de cigarettes aux travailleurs du quartier. Si elle n’en a toujours pas été officiellement informée, elle vient d’apprendre par hasard que son kiosque serait très prochainement détruit.

En raison de leur vétusté , la Ville a décidé de faire raser les kiosques de la Bourse, De Brouckère, de la place d’Espagne et de l’avenue des arts, pour les faire reconstruire à l’horizon 2017. Leurs actuels occupants doivent donc à court terme quitter les lieux : dès la fin novembre pour le premier, d’ici le 15 février 2016 pour les trois autres. Si le principe d’une modernisation de ces très vieux kiosques ne se discute pas, la manière dont les vendeurs de journaux, des personnes âgées d’origine vietnamienne et ne maîtrisant pas bien le français, sont mis à la porte pose néanmoins question.

Nga Phung Thi, 60 ans, qui exploite le kiosque de la Bourse depuis 20 ans, a en effet reçu un simple coup de fil mercredi de la société AMP, propriétaire du kiosque, l’informant qu’elle devait quitter les lieux… dans quatre semaines. Un appel téléphonique si incroyable que la vieille femme ne savait toujours pas vendredi si elle devait vraiment partir.

"Oui, on les a appelés. Ils doivent partir, car la Ville nous l’a demandé ", explique Salvatore Morgante, d’AMP. À la question de savoir si une lettre officielle serait envoyée, ce commercial de l’entreprise assure : "Oui sûrement, ou bien cela partira d’ici peu…"

Précisons que la Ville de Bruxelles n’est pas responsable de la façon avec laquelle ces vendeurs sont invités à quitter leur kiosque. L’AMP et l’échevine bruxelloise du commerce Marion Lemesre (MR) ont en effet signé une convention avalisant la démolition de ces kiosques… le 13 mai dernier. La société AMP était donc au courant depuis presque cinq mois. "Les dates n’ont été confirmées que vendredi", affirme-t-on du côté d’AMP. " C’est n’importe quoi. Ils ont juste espéré postposer les dates ", s’agace Isabelle Gellas, la cheffe de cabinet de l’échevine Lemesre.

De son côté, Nga, la vendeuse du kiosque De Brouckère, qui devrait prochaine ment partir à son tour, a peur. "Vous pensez que AMP et la Ville seront fâchés parce que je vous ai parlé ?", s’inquiète-t-elle.

Voir en ligne : Article paru dans la DH

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